Abstract
Sayyid Muhammad Bâqir Al-Hakîm
Notre recherche portera sur plusieurs questions relatives à ce thême coranique général. Elle sera divisée en quatre parties :
I- La différence entre le récit coranique et les autres récits
Nous y traiterons deux aspects :
1 – la relation entre le récit coranique et l’objectif général de la révélation du Livre Divin.
2 – Les caractéristiques essentielles du récit dans le Coran : quatre d’entre elles se rapportent au contenu et la cinquiême concerne le style.
II – Les principaux objectifs du récit
Nous en distinguons trois :
1 – Les objectifs à « dimension apostolique » en rapport avec les messages et la révélation divine. a – La confirmation de la révélation et du message. b – La similitude de ia religion et du dogme divin chez tous les prophêtes.
c – L’identité des moyens et des méthodes employés par ces apôtres ; l’identité des moyens adoptés par leurs communautés pour les affronter. d – L’authenticité des avertissements divins apportés par les messagers.
e – La démonstration des faveurs divines accordées à ces prophêtes et celle de Sa miséricorde à leur égard.
– Les tentations exercées par Satan sur les humains et son inimitié endémique à leur encontre. g – Les fins et l’objectif de l’envoi des prophêtes et des messagers.
2 – Les objectifs à » dimension pédagogique » en rapport avec les aspects psychologique et spirituel de rhomme.
a – Eduquer rhomme et le familiariser avec la foi et
le monde invisible.
b – L’éduquer à croire à la globalité du pouvoir divin.
c – L’éduquer à faire le bien et à éviter le mal.
d – L’éduquer à se soumettre à la volonté de Dieu, à Sa
sagesse et Son décret.
3 – Les objectifs à » dimension sociale » en rapport avec la société, son histoire et les facteurs qui interviennent dans son cours, ainsi que la démonstration de l’application des lois historiques sur l’activité humaine, comme par exemple :
a – La corrélation entre les changements sociaux et universels et les changements psychologiques de i’homme en tant qu’individu.
b – L’inéluctabilité de la victoire du Vrai contre le faux, du soutien divin aux prophêtes et du dénouement du combat en leur intérêt.
c – La mise à Pépreuve des humains.
d – La réalisation du changement social aprês de nombreux malheurs, adversités et épreuves.
-Les caractérïstiques du récit dans le Coran
1- La répétition
2 – L’insistance sur les récits évoquant seulement les prophêtes du Moyen-Orient.
3 – L’insistance sur l’histoire de certains prophêtes, telle que celles de (Moïse) et d’lbràhîm (Abraham).
4 – Le style du récit dans le Coran.
I V – La quatriême partie consistera en une étude du récit, dans laquelle on abordera l’histoire de Mûsâ en particulier, étant donné qu’elle fut longuement rapportée et qu’elle apparaît à plusieurs reprises dans le Coran. Nous pourrons, par la suite, appliquer cette étude sur les autres récits.
I- La différence entre les récits
coraniques et les autres récits
1- Le récit coranique et Pobjectif général de la révélation
Les récits coraniques se distinguent des autres récits par un point crucial en rapport avec l’objectif même pour lequel ils furent relatés. Ce point déterminera, comme nous le verrons, d’autres caractéristiques et spécificités. Malgré l’intérêt porté par le Coran à l’aspect esthétique, le récit ne constitue pas une oeuvre littéraire indépendante en soi, ou dans ses modes d’expression, le but ne vise point à rapporter les modes de vie anciens, encore moins à procurer une
distraction aux lecteurs, comme le font certains historiens ou conteurs.
L’objectif du récit dans le Livre Divin contribue, en collaboration avec d’autres moyens, à réaliser les fins religieuses qu’il prône, et oü le récit est indubitablement l’un des plus importantes.
Le Coran, tel que nous l’avons déjà mentionné dans notre étude intitulée » L’objectif de la révélation coranique » est un message religieux aspirant, avant tout, à opérer un changement dont les multiples dimensions se résument dans les thêmes suivants :
1 – Effectuer un changement social radical.
2 – Indiquer la voie appropriée pour la vie humaine, et gràce à laquelle peut s’opérer ce changement exprimé dans le Livre Saint par « le droit chemin », « As-siràt al mustaqîm ».
3 – Concevoir la base révolutionnaire capable d’assumer cette responsabilité.
Pour atteintre cet objectif, des moyens et des méthodes spécifiques étaient nécessaires, nous pouvoqs les remarquer dans les aspects suivants :
1 – L’échelonnement de la révélation du Coran.
2 – La fagon dont furent exposés les diverses idées, prescriptions, thêses ainsi que les concepts.
3 – Le lien entre la révélation du Coran et l’ensemble des événements et des faits qui constituent « les causes de la révélation ».
4 – L’expression de la révélation du Coran en langue arabe exclusivement.
5 – La disparité des styles adoptés dans l’exposé des divers thêmes : prolixité et détails, concision et
sobriété.
6 – La particularité du style coranique qui incorpore les images aux scênes ou expose plusieurs sujets dans un même passage.
7 – La diversité du style et du contenu s’agissant des versets mecquois ou médinois.
8 – La présence de l’abrogation, du précis, de l’implicite et du restreint dans les versets.
9 – L’élaboration détaillée des prescriptions légales islamiques.
1 0 – La présence de certains aspects personnels de la vie du prophête Muhammad.
Ce qui explique par ailleurs le nombre considérable d’études coraniques portant sur les versets abrogeants et abrogés, les versets clairs et implicites, les versets mecquois et médinois, les causes de la révélation et diverses techniques relatives au style coranique.
L’objectif général de la révélation du Livre Divin a aussi rejailli sur le récit, c’est pourquoi il ne peut qu’être pris en considération lors de l’étude de ses caractéristiques et spécificités, que ce soit au niveau du contenu ou du style adopté.
2- Les caractéristiques du récit coranique
A partir de ces caractéristiques, nous pouvons délimiter ia différence entre ce récit et tous les autres. Elles ont d’ailleurs été abordées par le Coran sacré dans Pun de ses versets qui cite :
«Dans leurs récits il y a certes une legon pour les gens doués d’intelligence. Ce n’est point là un récit fabriqué. C’est au contraire la confirmation de ce qui existait déjà avant lui, un exposé détaillé de
toute chose, un guide et une miséricorde pour des gens qui croient» (Yûsuf, 111) La parole divine définit le récit coranique par les traits suivants : le réalisme, l’authenticité, la sagesse et la moralité.
a – le réalisme signifie l’évocation des événements et des scênes en relation avec la vie, ses réalités et ses nécessités humaines, pressenties tout au long de l’histoire, au lieu du récit centré sur l’imaginaire, les espoirs et des désirs de l’homme. Car le Coran vise, à travers les histoires et les événements prophétiques, à une relecture de l’histoire humaine et des faits réels antérieurement vécus par les nations défuntes ou par les messages divins. II incite rhomme à poursuivre cette lecture au présent, afin d’en tirer profit et la prendre pour exemple dans son existence, son action, ses positions et ses aspirations, qu’elles soient vers l’avenir ou vers les perfections divines.
Or, si le récit se détournait de ce réalisme, il cesserait d’être profitable aux hommes et serait restreint aux illusions et suppositions, ce qui les priverait de ressentir ses effets ou d’y croire, moralement et spirituellement.
Dans son cheminement vers la perfection, l’homme a besoin de s’élancer à partir de « la réalité » sinon il s’égarerait dans les labyrinthes des espoirs et des souhaits. Le Coran a d’ailleurs traité cet état de rhomme en évoquant les Juifs qui font partie des gens du Livre :
«Et il y a parmi eux des illettrés qui ne savent rien du Livre hormis des prétentions et ils ne font que des conjectures» (al-Baqara, 78).
N’ayant pas pris un point de départ réaliste, l’homme s’avêre incapable de parvenir à ses fins, raison pour laquelle le Livre Sacré a tenté de traiter, par le biais du récit, ia réalité vécue par les Musulmans à l’époque du prophête : il rappelle ce qui correspond à la réalité tout comme il traite de ce que vivront les générations futures.
Certaines citations rapportées des Imams de la famille du Prophête peuvent expliquer ce point, telles que : « Le Coran est immortel » ou « Le Coran durera tant que dureront le soleil et la lune », paroles qui soulignent cette dimension et cette spécificité du récit coranique. II est même probable que le verset sus-mentionné (Yûsuf) «la confirmation de ce qui existait avant lui» soit une indication de ce trait.
b- L’authenticité de la narration des événements et des faits historiques concernant les envoyés de Dieu, au cours de leur existence, et ce face aux « mensonges », digressions et affabulations qui furent forgés avec préméditation, confusion ou ignorance et rapportés dans l’Ancien et le Nouveau Testament. Les récits et les événements relatés dans le Coran sont des réalités immuables, que le mensonge, l’erreur et l’équivoque n’ont pas altérées, comme ce fut le cas pour les livres antérieurs, car le Coran est l’inspiration divine, aucun atome du ciel et de la terre n’échappe au Savoir divin. II sait ce que l’ceil ne peut voir et ce que le cceur veut cacher, le présent, le passé et l’avenir sont équivalents pour Lui. Le verset suivant affirme cette vérité :
«Ce n’est point là un récit fabriqué»
II est nécessaire de clarifier la différence entre
ces deux caractéristiques apparemment voisines : le réalisme signifie ce qui a cours dans la vie des humains, il peut être authentique ou mensonger. Quant à l’authenticité, c’est ce qui est réellement arrivé.
Ces deux caractéristiques distinctes nous ouvrent des perspectives dans l’étude comparative entre les récits coraniques et ceux mentionnés dans les deux testaments, en ce qui conceme la compatibilité entre les événements ou les faits, les conceptions, les comportements et les réalités de l’existence humaine.
La deuxiême caractéristique nous permet, quant à elle, d’amorcer une comparaison historique entre les événements rapportés par le Coran et les informations historiques révélées par les recherches archéologiques.
Certains chercheurs dans ce domaine ont adopté une opinion différente concernant les faits relatés par le Livre béni. lls ont jugé que ce dernier ne se souciait pas d’affirmer l’authenticité des événements historiques évoqués, il se contentait d’évoquer les plus connus par les gens de l’époque de la révélation, pour l’unique fin d’en déduire les enseignements nécessaires. Dans cette optique, il pouvait rapporter des récits même s’ils n’étaient pas authentiques et même s’ils n’étaient pas relatés de fagon précise.
Mais Allàma M. H. Tabatabà’i a longuement discuté ce point de vue, écrivant : » Le Coran n’est pas un ouvrage historique et encore moins un recueil des contes imaginaires. C’est un livre précieux et unique, qui n’admet le faux en aucun cas, II ne révêle que la vérité, excluant toute erreur. Ce n’est pas seulement par foi en Dieu et en son messager que l’on nie que le
Coran puisse renfermer le faux et le mensonge, mais parce qu’il affirme être la parole divine, révélée pour orienter les humains vers leur vrai bonheur et le Vrai. II se doit donc pour tout commentateur du Coran de considérer son contenu véridique ».
c- L’éducation ä une éthique humaine élevée, opposée à celle fondée sur les sensations, les instincts et les réactions émotionnelles personnelles. Le récit coranique est qualifié de « moral » car le cheminement de rhomme, sur les plans individuel et collectif, se déroule sur la base de la moralité, aprês la foi en Allah, dans les messages et le Jour dernier ; de plus, la moralité éievée représente raccomplissement réel du mouvement humain. C’est pourquoi l’assise sociale humaine, du point de vue de l’lslam, est une assise morale, !e comportement élevé de l’homme est un comportement moral. Le messager d’Allah a d’ailleurs dit : « Je fus certes envoyé pour compléter les noblesses de la moralité ».
Le récit coranique fut donc toujours à caractêre moral : il inculque ia foi en Dieu et dans le monde invisible, la soumission à la sagesse divine et aux principes suprêmes de Péthique humaine, tels que la patience, le dévouement, i’amour d’Allah le Três-Haut, le sacrifice pour Sa cause, le courage et la droiture.
C’est le sens des concepts de « guide » et « miséricorde » du verset ci-dessus extrait de la sourate Yûsuf.
d- La sagesse dans le dévoilement des vérités universelies, des lois historiques et des causes qui influent sur le processus humain, sur les relations sociales ainsi que sur l’existence cosmique
divertissants.
Sheikh Muhammad Abdû avait tenté d’expliquer
l’absence de détails dans les récits, considérant que la prolixité des détails introduisait nécessairement des inexactitudes. Afin de les éviter, le Coran s’est limité à n’évoquer que des généralités.
Ce jugement est certes erroné pour deux raisons : !a premiêre est que le Coran est une révélation divine, il est donc inconcevable d’y supposer des erreurs ou des équivoques aussi bien dans ses généralités que dans ses détails. En second lieu, ce Livre divin détaille minutieusement la vie de certains messagers pour des raisons bien déterminées, comme pour nier la crucification de Jésus ou raconter les circonstances accompagnant sa naissance. De nombreux détails parsêment également la vie de Mûsâ, depuis sa naissance, en passant par son éducation, sa sortie d’Egypte, et jusqu’à son retour.
Aüama Tabatabà’î a évoqué cette particularité du récit coranique, écrivant : « Le Coran Sacré est un livre d’appel à la foi et de guidance, il ne se détourne guêre de sa mission. Ce n’est donc point une oeuvre historique et encore moins un récit narratif. II ne vise pas à l’étude des faits historiques, ni ä emprunter les moyens de l’art du conte, II ne s’intéresse ni à la généalogie, ni aux déterminations temporelles et spatiales, ni à d’autres traits pertinents indispensables par ailleurs à toute étude historique ou au récit imaginaire » (al-Mîzàn, 7, 167).
II- Les objectifs du récit dans le Coran
La récit a été congu pour contribuer au processus du changement humain dans ses divers aspects. La
question se pose donc sur les objectifs du récit coranique.
En premier lieu, nous remarquons que le récit comprend aussi bien dans son contenu que dans ses buts, les objectifs pour lesquels le Coran même fut révélé. Etant donné l’abondance des objectifs et leurs ramifications, nous limiterons notre exposé aux principaux afin de comprendre l’importance du rôle du récit et son utilité dans ce cadre.
Ces objectifs se répartissent en trois :
1- Les objectifs apostoliques :
a – L’affirmation de la révélation et du message : le Coran sacré ne provient pas du Prophête Muhammad, mais il lui fut révélé par Dieu pour orienter l’humanité vers son salut. Cet objectif a déjà été traité dans notre étude intitulée » Le caractêre inimitable du Coran » oü nous avons souligné que les propos du dernier des messagers avaient relaté avec beaucoup de précision, de détails, de sérénité et de confiance, les récits des nations antérieures, de leurs prophêtes et messagers, en prenant bien sûr en considération leur environnement culturel et social, dans le but de dévoiler une vérité sûre et inébranlable : la provenance de toutes ces informations d’une origine invisible, au courant de tous les secrets, qui n’est autre que Dieu.
Cette vérité fut à plusieurs reprises affirmée dans le Coran. Un verset de la sourate Yûsuf rappelle : «Nous te rapportons Nous-mêmes le meilleur récit en t’inspirant ce Coran même si certainement tu étais auparavant parmi les distraits» (Yûsuf, 3)
A la fin de ce récit, au sein de cette même sourate,
nous lisons : «Cela fait partie des nouvelles de l’inconnu que Nous t’inspirons. Tu n’étais pas avec eux lorsqu’ils tombêrent d’accord dans leurs intrigues» (Yûsuf, 102)
Un autre verset figurant dans Al-Qasas révêle, aprês avoir relaté l’histoire de Mûsâ : «Tu n’étais pas le long de la rive Ouest quand Nous arrêtàmes irrévocablement de confier la chose (le Message) à Moïse et tu n’étais point parmi les témoins. Mais Nous avons fait naître des générations et la durée de leur existence a été trop longue. Tu n’étais nullement installé à Madyan pour être (aujourd’hui) en mesure de leur faire le récit de Nos miracles, mais Nous avons fait de toi un messager. Tu n’étais point du côté du mont Tor quand Nous appelàmes (Moïse), mais c’est là un effet de la miséricorde de ton Seigneur afin que tu avertisses un peuple qui n’ont regu aucun avertisseur avant toi, peut-être se rappelleront-ils» (al-Qasas, 44-46)
Un verset au début de l’histoire de Myriam de la sourate ‘ÀI-‘Umràn cite : «Cela fait partie des nouvelles de l’lnconnu que Nous t’inspirons. Tu n’étais pas parmi eux alors qu’ils jetaient leurs calames pour savoir qui d’entre eux prendrait Marie à sa charge et tu n’étais pas parmi eux alors qu’ils se disputaient» (Àl-‘lmràn, 44)
Cette vérité fut réitérée dans l’histoire d’Adam, rapportée dans la Sourate Sàd : «Dis : « c’est lä une três grande nouvelle ». … dont pourtant vous vous détournez. Je n’avais aucune connaissance des querelles de la Cour sublime. On ne fait que m’inspirer que je ne
suis qu’un avertisseur en toute clarté» (Sàd, 67-70)
Ainsi que dans celle de Nûh (Noé) mentionnée dans la sourate Hûd : «Voici quelques-unes des nouvelles de l’inconnu que Nous t’inspirons. Tu n’étais point de nature à les connaître ni toi ni ton peuple avant ceci. Patiente ! Le lendemain appartient assurément aux gens pieux» (Hûd, 49)
Tous ces versets bénis affirment que le récit fut abordé par le Coran pour confirmer le concept de la révélation, primordial dans ia loi islamique.
b – L’identité de la religion et du dogme pour tous les prophêtes, quel qu’ait été leur nombre.
En effet, le principe reiigieux pour leque! ces apôtres furent envoyés est le même chez tous, l’origine de leur religion est unique et tous les prophêtes forment une seule communauté, qui adore l’Unique Dieu et appelle à L’adorer.
Cette vérité fut abordée par le Coran en divers endroits :
«Nous avons effectivement suscité dans chaque nation un Messager (pour leur dire) : « Adorez Dieu et évitez l’aberration de toutes les forces trompeuses ». Parmi eux, il en est que Dieu a guidés sur le droit chemin et d’autres méritent l’errance. Parcourez donc la terre et voyez comment fut le lendemain de ceux qui traitaient (Nos messagers) de menteurs» (An-Nahi, 36).
«Nous avons descendu la Torah contenant une bonne direction et une lumiêre. C’est sur sa base que rendent la justice ceux qui ont suivi Moïse, ies prophêtes qui se sont soumis à Dieu ainsi que les
gens au comportement divin et les docteurs…» (al-Mà’ida, 44)
L’objectif étant de
– mettre en valeur le rapport étroit entre l’lslam et toutes les autres religions divines propagées par les précédents messagers et prophêtes. L’lslam est !eur prolongement, il est l’épilogue des religions auquel toute l’humanité devrait aboutir, rompant de la sorte toute affiliation aux dogmes antécédents bien qu’ils aient été réellement révélés par Dieu. L’lslam les reconnaît mais s’il fut révélé, c’est pour asseoir son hégémonie.
«Nous t’avons fait descendre le Livre en toute vérité et bon droit, confirmant ce qui l’a précédé du Livre et le dominant» (al-Mà’ida, 48)
– certifier que L’lslam n’est point une hérésie dans l’histoire des messages auxquels il se rattache tant au niveau de ses objectifs que de ses idées et conceptions.
«Dis : « Je ne suis nullement une innovation parmi les Messagers et je ne sais pas ce qui sera fait de moi ni de vous »» (al-Ahqàf, 9)
L’lslam est le prolongement de ces messages divins qui, à leur tour, sont ses racines historiques. II s’agit donc d’un message moral dont le rôle consiste à modifier ce prolongement de l’histoire humaine et c’est pourquoi il compte un grand norrvbre d’adeptes et de fervents croyants. C’est d’ailleurs dans cette optique que le Coran rapporte l’histoire de plusieurs prophêtes dans une même sourate, mentionnée de fagon ä confirmer
cette cohésion étroite qui les relient au niveau de la
révélation ainsi que dans leur vocation.
Un exemple concret figure dans la sourate Al-
Anbiyà’ :
«Nous avons effectivement donné ä Moïse et à Aaron la distinction entre le vrai et le faux ainsi qu’une Lumiêre et un Rappel pour ceux qui craignent Dieu…. Nous avons effectivement donné à Abraham sa saine orientation et Nous en avions connaissance… lls voulurent lui jouer un mauvais tour mais Nous fîmes d’eux les perdants. Nous le sauvàmes de même que Loth (en les amenant) à la terre que Nous avons bénie pour les habitants de l’univers. Nous lui donnàmes Isaàc et Jacob en surplus et Nous en fîmes tous des gens vertueux…. Et Loth, Nous lui donnàmes sagesse, jugement et savoir et Nous le sauvàmes de la cité qui pratiquait !e vice…. Et Noé, quand il Nous appela auparavant, Nous répondîmes alors ä son appel et le sauvàmes, lui et les siens, du grand mal qui les affligeait… Et David et Salomon quand ils jugeaient ä propos du champ lorsque les troupeaux de ces gens s’y répandirent de nuit et Nous étions témoin de leur jugement… Et à Salomon (Nous soumîmes) le vent soufflant avec force et courant sur son ordre vers la terre que Nous avions bénie et Nous sommes au courant de toute chose… Et Job, quand il appela son Seigneur : « Le mal’m’a touché dans mon corps et Tu es le plus MisérJcordieux de tous les rniséricordieux ». Nous répondîmes à son appel, dissipàmes le mal dont il souffrait et lui donnàmes les membres de sa famille… Et Ismaël, Idrîs et
Dhoulkifl, tous appartenaient aux patients. Nous les fîmes entrer dans Notre miséricorde… Et l’homme à la baleine quand II s’en alla plein de colêre, croyant que Nous n’allions pas l’emprisonner (dans le ventre du poisson). II appela alors dans les ténêbres. « II n’y a de Dieu que Toi, gloire et pureté à Toi ! J’appartenais vraiment aux injustes » Nous répondîmes à son appel et le sauvàmes de ce qui l’oppressait. C’est ainsi que Nous sauvons les croyants. Et Zacharie, quand II appela son Seigneur : « Seigneur ! Ne me laisse point sans enfants et Tu es le meilleur des héritiers » Nous répondîmes à son appel et lui donnàmes Jean. C’étaient des gens empressés à faire les oeuvres de bien. lls Nous invoquaient par ambition et par crainte et ils étaient ä Notre égard plein de recueillement. Et celle qui défendit l’intégrité de sa chasteté. Nous alors insufflé en elle de Notre souffle vital et fîmes d’elle et de son fils un signe pour les habitants de l’univers. C’est celle-ci votre communauté, n’en formant qu’une seule et unique, et c’est Moi votre Seigneur et Maître. Adorez-Moi donc !» (48-92)
Dans cet exposé de récits prophétiques, !e Livre divin tend à indiquer ce concept d’unité profondément ancré dans la communauté pieuse croyant en un Dieu Unique. D’autres objectifs peuvent être relevés dans ces versets, le plus important étant l’indication des faveurs divines communes qui leur furent prodiguées.
Un autre exemple coranique indiquant l’identité du dogme principal chez tous les prophêtes, figure dans la sourate Al-A’ràf :
«Nous avons effectivement envoyé Noé à son peuple. II leur dit : « Ô mon peuple ! Adorez servilement Dieu ! Vous n’avez point de Dieu autre que Lui. Je crains vraiment pour vous le supplice d’un três grand jour »»
«Et ä Aad leur frêre Hûd, II dit : « Ô mon peuple ! Adorez servilement Dieu ! Vous n’avez point de Dieu autre que Lui. Ne craignez-vous donc pas Dieu ? »»
«Et aux Madianites leur frêre Shu’ayb. II dit : « Ô mon peuple ! Adorez servilement Dieu ! Vous n’avez point de Dieu autre que Lui. Voilà que vous est venue une preuve évidente de votre Seigneur »» (al-A’ràf).
En débutant par l’histoire de chaque prophête de cette maniêre, l’unicité du dogme et de la religion est affirmée chez tous : Dieu est Unique, le dogme est un, les apôtres forment une communauté unique et la religion est une.
– Démontrer que les moyens et les méthodes adoptés par ies envoyés de Dieu furent les mêmes, tout comme furent identiques les réactions de leurs nations et leur accueil des messages. De même, les facteurs, les causes et les manifestations auxquels furent confrontés les différents prophêtes sont identiques. Cette identité pergue dans plusieurs domaines fut abordée par quelques versets dont :
«Combien de fois un prophête a vu combattre à ses côtés nombre de gens à la nature divine ! lls ne se sont nullement découragés a la suite de ce qui leur était arrivé sur le chemin de Dieu…»
Parfois le Coran évoque l’histoire des prophêtes d’une fagon générale, dans le but de certifier cette unité qui ies assemble, comme dans la sourate Ibràhîm : «Leurs messagers leur ont apporté les preuves évidentes, mais ils leur firent rentrer leurs paroles bienfaisantes dans leurs bouches…»
L’insistance du Coran sur cette vérité vise à montrer la justesse des attitudes des prophêtes et des moyens utilisés, ainsi que leurs conséquences et leur impact, et ensuite à Ia confirmer. Conformément à ces objectifs, de nombreux récits concernant les prophêtes figurent, réunis, oü est reprise la méthode de la propagation divine.
La sourate Hûd relate :
«Nous avons déjä envoyé Noé à son peuple : « Je suis pour vous un avertissement explicite afin que vous n’adoriez qu’Allah. Je crains pour vous le chàtiment d’un jour douloureux. » Les notables de son peuple qui avaient mécru, dirent alors : « Nous ne voyons en toi qu’un homme comme nous ; et nous voyons que ce sont seulement les vils parmi nous qui te suivent sans réfléchir ; et nous ne voyons en vous aucune supériorité sur nous. Plutôt, nous pensons que vous êtes des menteurs ». II dit : « ô mon peuple ! Que vous en semble ? Si je me conforme à une preuve de mon Seigneur, si une Miséricorde, (prophétie) échappänt ä vous yeux, est venue à moi de Sa part, devrons-nous vous l’imposer alors que vous la répugnez ? Ô mon peuple, je ne vous demande pas de richesse en retour. Mon salaire n’incombe qu’ä Allah….»
Sa communauté lui réplique alors : «Ô Noé, tu as disputé avec nous et multiplié les discussions. Apporte-nous donc ce dont tu nous menaces, si tu es du nombre des véridiques» (Hûd, 25-32)
Cette même situation est reprise avec le prophête Hûd, de la tribu de ‘Àd, ainsi qu’avec le prophête Sàlih, de la tribu Thamûd .
d – i’attestation des heureuses nouvelles et des
avertissements : en effet, Dieu a promis à ceux qui
Lui obéissent, Sa clémence et Son pardon, et a averti
ceux qui Lui désobéissent qu’ils subiront une torture
douloureuse. Afin de prouver la réalité de ces nouvelles
et avertissements, le Coran sacré a relaté certains
faits qui les confirment. En voici quelques exemples :
«Quand ils entrêrent chez lui et dirent : « Salam »
– ils dirent : « Nous avons peur de vous ». lls dirent :
« N’aie pas peur ! Nous t’annongons une bonne
nouvelle [ia naissance] d’un gargon plein de savoir»
(al-Hijr, 52-53)
Ce verset exprime la clémence et l’heureuse nouvelle. Quant aux versets suivants : «Puis lorsque les envoyés vinrent auprês de la famille de Lot, celui-ci dit : « Vous êtes des gens inconnus ». lls dirent : « Nous sommes plutôt venus ä toi en apportant (le chàtiment) à propos duquel ils doutaient. Et nous venons à toi avec la vérité. Et nous sommes véhdiques. Pars donc avec ta famille en fin de nuit et suis leurs arriêres ; et que nul d’entre vous ne se retourne. Et allez là oü on vous le commande ». Et Nous lui annongàmes cet ordre : que ces gens-là, au matin, seront anéantis jusqu’au dernier» (al-Hijr, 66), ils révêlent d’urïe part, l’indulgence accordée au prophête Lot et de l’autre, le
chàtiment infligé à sa nation.
Or, dans le récit rapporté par ces paroles : «Certes, les gens d’al-Hijr ont traité de menteurs les messagers. Nous leur avons montré Nos miracles, mais ils s’en étaient détournés. Et ils taillaient des maisons dans les montagnes, vivant en sécurité. Puis au matin le Cri les saisit. Ce qu’ils avaient acquis ne leur a donc point profité» (al-Hijr, 80-84). Ce chàtiment fut réservé aux incrédules qui démentirent les avertissements divins.
e – l’énoncé des faveurs octroyées par Dieu à Ses prophêtes, telles que Son indulgence et Son agrément, confirmant les liens qui ies unissent à Lui. Ce concept fut affirmé par le Livre Saint à plusieurs reprises et en différents endroits :
«Quiconque obéit à Allah et à Son messager… ceux-là seront avec ceux qu’Allah a comblés de Ses bienfaits : les prophêtes, les véridiques, les martyrs et les vertueux. Et quels bons compagnons que ceux-là» (an-Nisà’, 69) ainsi que dans les récits prophétiques tels que ceux de Sulaymàn (Salomon), Dàwûd (David), Ibràhîm (Abraham), Maryam (Marie), ‘lsa (Jésus), .Zakaria (Zacharie), Yûnus (Jonas) et Mûsâ (Moïse).
Les prophêtes subissent habituellement toutes sortes de souffrances et d’affliction qui pourraient laisser croire à certains naïfs qu’Allah abandonne Ses apôtres, d’oü l’importance de ces propos qui affirment au contraire qu’üs bénéficient de ia gràce divine comme signe de Son attachement à leur égard. Quelques épisodes de ces récits ont pour objectif de mettre l’accent sur ces faveurs accordées à différentes
occasions. La sourate al-‘Anbiyà’ illustre ce point.
Dans la sourate Maryam, le Coran conclut par ces paroles :
«Voilà ceux qu’Allah a comblés de Ses faveurs, parmi les prophêtes, parmi les descendants d’Adam, et aussi parmi ceux que Nous avons transportés en compagnie de Noé, et parmi la descendance d’Abraham et d’lsraël, et parmi ceux que Nous avons guidés et choisis» (Maryam, 58).
f – signaier le rôle néfaste exercé par Satan sur l’homme ainsi que son animosité endémique ä son encontre, cherchant toute occasion pour lui porter nuisance. II s’agit de prévenir les humains de son attitude réelle à ieur égard.
Le récit réflête nettement ces vérités et ces relations amenant l’homme à la prudence. Raison pour laquelle la confrontation d’Adam et de Satan est reprise, sous diverses formes. Nous pouvons même dire que le récit d’Adam vise à illustrer ce thême.
g – expliquer la finalité de l’envoi des messagers et des prophêtes. Elle consiste à communiquer les messages divins, à orienter les humains vers le Vrai, à les purifier, à résoudre leurs différends, à faire régner la justîce, à combattre la corruption et surtout à présenter les arguments divins.
«Allah envoya des prophêtes comme annonciateurs et avertisseurs ; et II fit descendre avec eux le Livre contenant la vérité, pour régler parmi les gens leurs divergences» (al-Baqara, 213)
109
«en
jour du jugement dernier.
c – Eduquer rhomme à une moralité vertueuse, en l’incitant à faire le bien, à se détourner du mal et de la corruption et en démontrant les conséquences inévitables des actions humaines. Les exemples figurent dans les récits des fils d’Adam, du propriétaire des deux jardins, des fils d’lsra’îl suite à leur désobéissance, du barrage de Ma’rib, des deux propriétaires des deux jardins et des habitants des fossés, histoires qui enseignent la patience, le dévouement et l’endurance.
d – L’éduquer à se soumettre à la volonté et à la sagesse divines qui se manifestent dans les relations cosmiques et sociales de ce monde ainsi que dans la sagesse humaine, comme les faits avec la mêre de Mûsâ qui fut inspirée de jeter son fils à l’eau. L’histoire de la rencontre de Mûsâ avec «l’un de Nos serviteurs à qui Nous avions donné une gràce, de Notre part et à qui Nous avions enseigné une science émanant de Nous».
3 – Les objectifs sociaux et historiques
II s’agit de l’exposition des lois historiques qui régissent le mouvement de l’homme et de la société humaine.
En effet, la société humaine est soumise, dans son mouvement et son évolution, à des lois bien étabiies. Certaines furent rapportées par le Livre divin qui leur accorde une importance non négligeable. Le récit contribue à les concrétiser en rapportant les événements survenus. Nous indiquerons quelques-unes de ces lois en relatant les récits correspondants.
a – La relation entre le changement social et le changement spirituel et psychologique dans la société. Les versets s’y rapportant révêlent :
«C’est qu’en effet Allah ne modifie pas un bienfait dont II a gratifié un peuple avant que celui-ci change ce qui est en lui-même… II en fut de même des gens de Pharaon et ceux qui avant eux avaient traité de mensonges les signes de leur Seigneur…» (Al-Anfàl, 53-54)
«En vérité, Allah ne modifie point l’état d’un peuple, tant que les [individus qui le composent] ne modifient pas ce qui est en eux-mêmes» (ar-Ra’d,
11)
«Si les habitants des cités avaient cru et avaient
été pieux, Nous leur aurions certainement accordé
des bénédictions du ciel et de la terre. Mais ils
ont démenti et Nous les avons donc saisis, pour ce
qu’ils avaient acquis» (Al-A’ràf, 96)
Parmi les exemples les plus expressifs de cet
objectif, citons des passages de la sourate al-A’ràf
oû sont exposés les récits de Nûh, Hûd, Sàlih, Lot et
Shu’ayb, et ce qui leur arriva lorsqu’ils furent
confrontés à leurs peuples résume cette loi générale :
«Nous n’avons envoyé aucun prophête dans une cité
sans que Nous n’ayons pris ses habitants ensuite
par l’adversité et la détresse afin qu’ils’ implorent
(le pardon). Puis Nous avons changé leur mauvaise
condition en y substituant le bien, au point qu’ayant
grandi en nombre et en richesse, ils dirent : « la
détresse et l’aisance ont touché nos ancêtres aussi ».
Et bien, Nous les avons saisis soudain, sans qu’ils
s’en rendent compte» (al-A’ràf, 94-95).
L’histoire de Pharaon avec Mûsâ, telle qu’elle figure dans la sourate al-Anfàl dans les versets 53-54 traite aussi cette loi. Ceci est rappelé encore pius clairement dans l’histoire de Mûsâ, telle qu’elle est exposée dans al-A’ràf, révélée avant al-Anfàl. Nous pouvons le comprendre par les indices suivants :
– ce récit vient à la suite des versets qui mentionnent cette loi.
– le contenu du récit exhorte d’abord à la patience et à l’imploration de l’assistance divine puis rappelle l’obstination des gens de Pharaon à démentir l’apostolat et à tyranniser ses partisans, pour finalement conclure par le chàtiment infligé à Pharaon et ses partisans, en opposition à la récompense octroyée aux Fils d’lsra’îl en leur concédant l’héritage de la terre.
b- La loi qui atteste la victoire du Vrai contre le Faux et qui fut mentionnée à plusieurs reprises :
«Et dis : « La Vérité est venue. L’Erreur a disparu. Car l’Erreur est destinée à disparaître »» (al-lsrà’, 81)
En ce qui concerne ce sujet, le livre divin a confirmé que les envoyés de Dieu, quelles qu’aient été ieurs endurances et souffrances, sont ceux qui jouiront du soutien de Dieu, gràce auquel toute lutte entre eux et leurs ennemis, au sein même de leurs communautés, se dénouera en leur faveur :
«Et Nous avons certes écrit dans le Zabûr aprês l’avoir mentionné que la terre sera héritée par Mes bons serviteurs» (Al-Anbiyà’, 105) ; «Nous secourrons certes Nos messagers et ceux qui croient, dans la vie présente comme au jour oû les
sourate al-Mu’minûn ( 23-30). Ces paroles viennent aprês un exposé sur la création de rhomme et les faveurs divines. Elles sont conclues par ces mots : «Voilà bien des signes. Nous sommes certes Celui qui éprouve».
Cette sourate aborde par la suite les autres envoyés de Dieu et les siêcles passés, en exposant les afflictions dues à la révélation du message ainsi que les chàtiments infligés à ceux qui l’ont contredit. Elle évoque Mûsâ et ‘îsà et s’adresse aux messagers, leur enjoignant de se nourrir sainement et d’effectuer de bonnes actions, avant de conclure : «Cette communauté, la vôtre, est une seule communauté, tandis que Je suis votre Seigneur. Craignez-Moi donc !» Elle mentionne de plus l’hétérogénéité des êtres humains, et l’assistance qui leur parvient en biens et en progéniture, ce qui constitue aussi une épreuve en soi, ainsi qu’en ses conséquences.
d – l’avênement de la victoire divine ne se réalise qu’aprês les malheurs et les adversités endurés. Dieu rappelle :
«Quand les messagers faillirent perdre espoir (et
que leurs adeptes) eurent pensé qu’ils étaient dupés,
voilà que vint à eux Notre secours. Et furent sauvés
ceux que Nous voulûmes.» (Yûsuf, 11 0)
Cette vérité est affirmée dans les récits coraniques
qui relatent l’histoire et le combat des compagnons
de Jésus, figurant dans la sourate As-Saff. Elle l’est
aussi dans l’histoire du conseil des notables chez les
fils d’lsra’îl, rapportée par la sourate Al-Baqara. Ainsi
que dans le récit de Nûh évoqué dans la sourate Hûd.
III- Caractéristiques générales du récit
coranique
A la lumiêre des objectifs dégagés, nous allons aborder les caractéristiques essentielles qui se sont manifestées au cours de notre étude.
1-La répétition du récit dans le Livre béni
L’une des caractéristiques semble être la répétition du même récit à différents emplacements du Coran.
Quelques doutes furent suscités à propos de ce phénomêne. disant : ayant figuré dans le Coran une premiêre fois, le récit a épuisé ses objectifs religieux, pédagogiques et historiques, pourquoi le mentionner donc plusieurs autres fois ?
Nous trouvons une indication à ce propos dans al-Mufradàt de Ràghib al-Asfahànî ainsi que dans l’introduction à At-Tibyàn d’at-Tûsî, qui expliqua cette caractéristique par le fait que les sourates étaient envoyées aux différentes tribus au fur et à mesure qu’elles étaient révélées au prophête Muhammad. Or, si ces récits n’avaient pas été repris, certaines tribus n’auraient connu que l’histoire de Mûsâ, par exemple, alors que d’autres n’auraient été informées que de celle de Jésus et ainsi de suite. Par Sa clémence, conclut At-Tûsî, Dieu voulut diffuser ces récits aux quatre coins du monde, afin de les rendre célêbres et qu’ils soient assimilés.
Seion At-Tûsî, deux facteurs expliquent ia répétition du récit :
1 – La dispersion des passages coraniques aident à
la propagation des différents récits.
2 – La compréhension du Coran chez ceux qui regoivent la révélation dans sa totalité.
II est vrai que l’argmentation de sheikh At-Tûsî ne traite pas la question de fagon définitive, elle démontre néanmoins que ce sujet fut abordé dans les études coraniques chez les plus anciens.
Nous citerons d’autres explications à cette caractéristique :
a – La répétition est due à la diversité des objectifs religieux découlant du même récit. Un récit pourrait remplir un objectif en un endroit et un autre en un autre endroit.
b – Le Coran sacré se sert du récit pour appuyer certains concepts islamiques au sein de la nation musulmane et ce, en partant de sa réalité vécue pour la rattacher à celle du récit, tant au niveau du contenu que du but. Mais ce rattachement du concept islamique déduit du récit à la réalité vécue par les Musulmans pourrait entraîner une compréhension erronée de ce concept, qui risquerait d’être restreint au contexte du récit. La réitération de ce dernier évite d’une part toute délimitation du concept et permet d’autre part sa généralisation aux réalités simiiaires, en le dotant des spécifités morales ou historiques conformes aux événements et aux réalités.
c – La répétition pourrait être un facteur d’efficacité du récit en tant que stimulant pour la nation, la prévenant du lien entre sa réalité vécue, et le concept musulman dont elle doit puiser l’esprit et la méthode.
La réitération du récit servirait donc à investir ce stimulant en cas de besoin.
Ces deux derniêres causes sont certes les pius probables dans le cas de l’histoire de Mûsâ, dont l’esprit diffêre selon sa situation dans les sourates mecquoises ou médinoises. Dans les premiêres, elle se concentre surtout sur la relation de Mûsâ avec Pharaon et ses partisans, sans trop s’attarder sur ses relations avec son peuple, les fils d’lsra’îl, à l’exception de deux passages qui révêlent leur déviation du dogme divin. Dans !es secondes, c’est surtout ses rapports avec son peupie, dans les divers aspects sociaux et politiques, qui sont mis en valeur. La répétition de ce récit dans les sourates mecquoises aspirerait donc ä trouver un remêde spirituel aux diverses situations auxquelles furent confrontés le prophête Muhammad et les Musulmans, en élargissant le cadre du concept général de l’histoire de Mûsâ, soit dans sa relation avec les tyrans de son peuple, ou dans les rêgles qui la régissent, pour conclure à ia simüarité, quels que soient les événements ou les positions rencontrés. Cette interprétation fut d’aiileurs mentionnée dans quelques versets de la sourate al-Furqàne :
«Et ceux qui ne croient pas disent : « Pourquoi n’a-t-on pas fait descendre sur lui le Coran en une seule fois ? » Nous l’avons révélé ainsi pour raffermir ton cosur. Et Nous l’avons récité soigneusement. lls ne t’apporteront aucune parabole, sans que Nous ne t’apportions la vérité avec la meilleure interprétation. Ceux qui seront traînés sur leurs visages vers l’Enfer, ceux-là seront dans la pire des situations et les plus égarés
hors du chemin droit» (al-Furqàne, 32-34). Ces versets rappellent les causes de la révélation progressive du Coran, c’est-à-dire pour renforcer la position du prophête d’une part et présenter d’autre part le Vrai ainsi qu’une meilleure interprétation des événements et des enseignements puisés dans l’histoire de Mûsâ.
d – L’appel islamique a traversé plusieurs étapes, que le Coran accompagnait et reflétait dans ses contributions et la nature de son style. Ce qui nécessitait un exposé du récit avec des styles variés, étant donné la nature de la vocation et la modalité d’exposition des concepts et des expressions, comme nous le voyons dans les récits prophétiques révélés dans les sourates mecquoises courtes, puis développées dans les sourates mecquoises plus avancées ou médinoises.
e – La répétition du récit telle qu’elle se présente dans le Coran ne signifie pas leur reprise telles quelles. Les détails mentionnés et la fagon d’exposer le récit diffêrent, l’imprêgnant à chaque fois d’un concept religieux différent. Cette texture coranique nécessite la réitération des récits afin de réaliser l’objectif spécifique distinct de celui qui émanerait d’une autre texture du même récit. Là aussi, l’étude pratique de l’histoire de Mûsâ contribuera à élucider ces traits.
As-Suyûtî a, de son côté, énuméré plusieurs causes dans Al-ltqàn, originellement attribuées à al-Badr b. Jama’a. En plus de celles formulées par Sheikh At-Tûsî et rapportées ci-dessus, il considêre que cette répétition est un moyen de défier les Arabes au sujet
de l’élaboration d’un livre semblable (le Coran).
2- La limitation des récits aux prophêtes du Moyen Orient
L’autre phénomêne repéré dans le Livre de Dieu est qu’ll n’évoque que les envoyés au Moyen Orient, c’est-à-dire la région qui concerne les Arabes, chez qui ce livre divin sera révélé. Ce qui pourrait laisser croire entre autre que les prophéties étaient apparues dans cette contrée, puis s’étaient propagées dans le reste du monde.
Cette thêse est soutenue par l’histoire des prophéties et l’histoire humaine, mentionnée dans la Thora, dans certaines recherches archéoiogiques ainsi que dans quelques récits rapportés par les descendants de ia familie du prophête, ce qui attribuerait l’apparition de ce phénomêne à la réalité historique de l’existence humaine.
Or, des témoignages du Coran réfutent cette interprétation et certifient l’existence de nombreux prophêtes non mentionnés dans le Livre Sacré, bien que leur vie a dû être riche en événements, à l’instar des autres : «Et il y a des messagers dont Nous t’avons raconté l’histoire précédemment, et des messagers dont Nous ne t’avons point raconté l’histoire» (an-Nisà’, 164). Cette sourate médinoise fut révélée aprës de nombreuses sourates, récits prophétiques.
Certains versets révêlent que les prophêtes et messagers furent envoyés vers toutes les cités et les contrées afin de convertir les hommes et d’y exposer les arguments divins. Le verset 165 succédant aux
deux versets ci-dessus de la sourate an-Nisà’ cite à ce propos : «en tant que messagers, annonciateurs et avertisseurs, afin qu’aprês la venue des messagers il n’y eût pour les gens point d’argument devant Allah. Allah est Puissant et Sage»
D’autres versets rapportent aussi :
«Nous avons envoyé dans chaque communauté un messager, [pour leur dire] : « Adorez Allah et écartez-vous du taghût »» (an-Nahl, 36). Dans d’autres versets, le terme « témoin » remplace « prophête » ou « envoyé » comme dans an-Nisà’, 41 ou an-Nahl, 84.
Une autre interprétation serait aussi valable pour expliquer ce phénomêne : celle qui découle de l’objectif principal du récit qui implique la déduction des enseignements et des lois historiques.
Le Coran aborde les traits généraux communs chez les prophêtes, et parfois certains détails minutieux sans aspirer pour autant à relater la biographie des prophêtes ou leurs histoires.
Or, l’impact du récit sur la réalisation de ces objectifs dépend de la conformité de ses conditions à celles de la communauté destinataire. C’est pourquoi le récit extrait de l’histoire même de la nation, de sa réalité et de sa vie, est plus apte à confirmer les lois historiques et à influer sur la réalité spirituelle et psychologique du groupe.
Ce qui pourrait bien signifier que le Coran se fixe à travers cette interaction avec l’histoire à opérer en premier lieu un changement chez les peuples qui occupent cette région, afin que ces dernier s’élancent, dans en second iieu, vers les autres populations pour les convertir aux mêmes principes. II est certes vrai
que le récit extrait de l’histoire plausible des prophéties chez les Hindous ou les chinois exercerait une influence plus certaine sur ces peuples, mais le message islamique aspirait lors de sa révélation à opérer un changement chez les Arabes et les populations voisines. La relatation des histoires puisées chez les communautés étrangêres aurait écarté le récit du réalisme indispensable à son impact.
De plus, le récit se rapportant à chaque prophête jouit d’une influence spécifique liée au milieu auquel il appartient, car il concrétise le vécu de cet environnement, l’imprégnant émotionellement et sentimentalement. Parallêlement, il exerce son impact général, dans le cadre des concepts universels et des lois historiques qu’ii inspire et des enseignements qu’il implique, ce qui concerne tous les autres peuples, C’est ainsi que le Coran réalise sa dimension universeile globale et subsiste tout en influant sur tous les milieux humains.
II faut considérer que ies prophêtes tels que Nûh (Noé), Ibràhîm, Mûsâ, ‘îsà représentent les principes généraux des prophéties dans le monde. Le prophête Muhammad, le sceau de ia prophétie, est leur prolongement. Mais le Coran ne s’est pas contenté d’évoquer ces envoyés de Dieu, mais il a aussi parlé de Sàlih, Shu’ayb, Hûd, Yûnus, Idrîs et beaucoup d’autres dont le rôle ne fut pas aussi prépondérant que les premiers. Aliah sait mieux que quiconque.
3- La confirmation des histoires de Mûsâ et d’lbràhîm
Nous remarquons aussi que le Livre saint a noté,
dans ses récits de certains prophêtes, plus de détails de leur vie et de leur environnement, et ce malgré les thêses qui soutiennent Punité des caractêres communs de l’action de tous les apôtres. Cette mise en valeur octroyée à ces grands hommes signifierait-elle leur priorité par rapport aux autres ? Ou y aurait-il d’autres raisons ?
En réalité, certains messagers pourraient être considérés favorisés par rapport aux autres. Le Coran a explicitement exprimé que les prophêtes Nûh, Mûsâ, et ‘îsâ étaient les meilleurs les qualifiant d’hommes de résolution. Mais ce jugement n’implique pas nécessairement leur préférence. Le Livre saint ne vise pas à évaluer leurs actions et encore moins à comparer leurs mérites respectifs. Les objectifs principaux demeurent la déduction des enseignements, la confirmation des prophéties, la présentation des arguments et l’attestation de l’authenticité de la prophétie de Muhammad, et celle du contenu de son message.
Les versets suivants indiquent : «Et tout ce que Nous te racontons des récits des messagers, c’est pour en raffermir ton cceur. Et de ceux-ci t’est venue la vérité ainsi qu’une exhortation et un rappel aux croyants» (Hûd, 1 20) «Dans leurs récits il y a certes une legon pour les gens doués d’intelligence. Ce n’est point là un récit fabriqué…y> (Yûsuf, 111)
lls permettent de déduire que l’une des causes de cette proüxité pergue dans Pévocation de certaines personnalités prophétiques dans ie Coran réside dans
la orésence de disciole
l’envoi du messager arabe qui sera le libérateur, et l’envoi du messager est une réponse à l’invocation d’lbràhîm.
e- Octroyer au message islamique une certaine indépendance à l’égard du judaïsme et du christianisme, et libérer le milieu qui accueillait l’lslam du sentiment de subordination envers les théologiens israélites et chrétiens. Ces derniers étaient considérés en tant que gens du Livre et de connaissance des religions et des messages divins, leurs religions étaient pergues comme l’origine de toutes les autres. Le Coran renie catégoriquement cette prétention en disant :
«Abraham n’était ni juif ni chrétien. II était entiêrement soumis à Allah (Musulman). Et il n’était point du nombre des associateurs. Certes les hommes les plus dignes de se réclamer d’Abraham, sont ceux qui l’ont sulvi, ainsi que ce prophête-ci, et ceux qui ont la foi. Et Allah est l’allié des croyants» (Àl-‘lmràn, 67-68)
D’oü Pimportance qui réside dans la parole coranique au sujet de l’édification de la Ka’ba, qui jouit d’une grande considération chez les Arabes, par Ibrahim même, et son appel au pêlerïnage, rite religieux absent dans les deux premiêres reiigions. La proclamation de cet édifice en tant que qibla des musulmans (vers laquelle ils se dirîgent pendant leurs priêres et d’autres cultes) certifie l’indépendance du message dans ces aspects. Le fait de se détourner de Jérusalem qui jouit d’une vénération particuliêre pour avoir été le bercail des différentes religions, et pour avoir renfermé les tombeaux de nombreux prophêtes, dont Ibrahim et ses descendants des Fils d’lsraël,
nécessitent d’accorder une importance égale à la Ka’ba en rappelant sa construction par le prophête Ibrahim.
Quant au messager de Dieu, Mûsâ, l’importance de ses récits auraient plusieurs causes :
a – Son rôle au sein du judaïsme et du peuple israélite et sa contribution dans les réalisations politiques, sociales et même législatives effectuées.
b – La ressemblance des épreuves traversées pai ce prophête à celles du dernier des messagers Muhammad, aussi bien dans sa lutte contre la tyrannie pharaonique et l’hypocrisie de certains juifs, que dans la consolidation des piliers du pouvoir divin sur terre
c – Sa situation distinguée au sein des deux religions juive et chrétienne. Le christianisme qui reconnaîi l’ancien Testament (!a Thora) se réfêre à Mûsâ, e–adopte toutes ses lois et préceptes rapportés, U christianisme se considêre une réforme au judaïsr™ et une rectification de ses digressions.
d – Certaines circonstances objectives qui régnaien dans l’environnement social de la révélation coraniqu* ont concerné de prês ces deux prophêtes : Le Corai qui s’adressait directement aux gens du Livre, à leur: théologiens et à leurs communautés, avait besoin d< détails liés à la vie personnelle de Mûsâ afin d’influe sur leurs milieux.
e – Les polythéistes arabes estimaient le
théologiens juifs auxquels ils se liaient parfois. /
leurs yeux, ils étaient des invocateurs de Dieu, de
déteneurs du Livre de la révélation divine et des savant
en messages divins. Certains versets mentionnent :
«Nous n’avons envoyé, avant toi, que des homme
auxquels Nous avons fait des révélations. Demande
donc aux gens du rappel si vous ne savez pas» (an-Nahl, 43).
Or, en évoquant le prophête Mûsâ et en révélant ses particularités plus amplement que dans les deux anciens Testaments, le Livre sacré marque une incidence certaine dans ces milieux aussi.
f- Cette conception coranique souligne que les messages représentent un prolongement unique de l’inspirations divine. Elle insiste sur l’indépendance du message islamique tant au niveau apostolique que politique. II n’est nullement une réforme interne à ces messages. II les confirme, d’un côté, tout en proclamant à leur égard sa suprématie et son indépendance. Dieu rappelle :
«Et sur toi (Muhammad) Nous avons fait descendre le Livre avec la vérité pour confirmer le Livre qui était là avant lui et pour prévaloir sur lui. Ne suis pas leurs passions, loin de la vérité qui t’est venue. A chacun de vous Nous avons assigné une législation et un plan ä suivre. Si Allah avait voulu certes, II aurait fait de vous tous une seule communauté. Mais II veut vous éprouver en ce qu’ll vous donne. Concurrencez donc dans les bonnes oeuvres. C’est vers Allah qu’est votre retour à tous ; alors II vous informez de ce en quoi vous divergiez» (al-Mà’ida, 48)
Les versets qui précêdent celui-ci offrent une mise au point plus explicative : ils mentionnent ia révélation de la Thora et celle de l’Evangüe en mettant l’accent sur le lien étroit qui les unit et qui semble bien
différent de celui du Coran à leur égard.
Quant à l’évocation du prophête Jésus, dans le Coran, elle aspire surtout à éliminer chez ceux qui regoivent la Parole divine, toutes les idées et les conceptions erronées qui contredisent l’infaillibilité des envoyés de Dieu qui doutent de leur relation à Dieu ou de la nature de leur personnalité. C’est pourquoi le Livre divin aborda plus longuement sa personnaüté et l’environnement dans lequel il naquit que ses actions et ses activités.
Dieu nous rapporte sur ce thême : «Pour Allah, Jésus est comme Adam qu’ll créa de poussiêre, puis !l lui dit : « Sois » ; et ce fut. La vérité vient de ton Seigneur. Ne sois donc pas du nomhre des sceptiques. A ceux qui te contredisent à son propos, maintenant que tu es bien informé, tu n’as qu’à dire : « Venez, appelez nos fils et les vôtres, nos femmes et les vôtres, nos propres personnes et les vôtres, puis proférons exécration réciproque en appelant la malédiction d’Allah sur les menteurs. Voilà certes le récit véridique. Et /7 n’y a pas de divinité ä part Allah. En vérité, c’est Allah qui est le Puissant, le Sage» (Àl-‘lmràn, 59-62)
Cette vision s’applique aux épisodes de !a vie de Myriam et la naissance de Jésus mentionnés dans les sourates Àl-‘imràn et Maryam ainsi qu’à l’idée de la divination de cet apôtre, débattue dans la sourate Al-Mà’ida.
4- Le style du récit coranique
Le style du récit dans le Livre Saint se distingue três nettement des récits du patrimoine littéraire
humain : parfois, le Coran se contente de relater les événements de fagon globale, sans ordre chronologique, ou de passer d’un fait à l’autre, n’en traitant qu’une partie.
Dans d’autres cas, il traite longuement les concepts, les vérités, les thêmes dogmatiques, éthiques, cosmiques ou légaux.
Le récit englobe des spécifités et des caractéristiques qui suscitent de nombreuses interrogations à propos de son style. II n’est pas, en tout cas, une oeuvre littéraire indépendante en soi ou dans ses objectifs, et il ne peut prétendre à avoir une identité propre.
Cette question sera abordée sous deux aspects : l’un concernant le côté esthétique oü l’on s’apergoit que le récit coranique comprend les éléments essentiels de l’oeuvre Sittéraire, et l’autre expliquant la particularité de ce phénomêne dans le style coranique du récit.
Le premier aspect fut suffisamment traité dans des études coraniques littéraires spécialisées, ainsi que dans d’autres, plus générales, anciennes et récentes.
Le deuxiême aspect nous permet de relever principalement que le style du récit dans le Coran est en harmonie avec le style général de ce Livre, que nous pouvons discerner gràce à l’étude de ses caractéristiques littéraires et esthétiques, qui montrent le caractêre inimitable du Coran. En tête de ces caractéristiques figurent :
a- Le mélange des thêmes et des concepts dans un même paragraphe, dans le but d’en extraire une idée complête, tant en sachant que le Coran n’est point une oeuvre scientifique, mais un iivre de foi et de miséricorde. Ainsi, les vérités cosmiques, !es connaissances dogmatiques et les prescriptions légales concernant les comportements sont incorporées aux sermons, aux directives, aux mises en garde ainsi qu’à la propagation de la foi. Les sentiments, les sensations et les perceptions rationnelles s’y ingêrent aussi, afin de purifier l’homme et lui enseigner l’engagement sur la voie de la vérité.
b- La réitération des sujets et des concepts divers sous différentes formes, pour mieux les certifer, et réaliser de plus quelques objectifs supplémentaires, comme nous l’avons fait remarquer à propos de la répétition et comme nous le démontrerons dans l’étude détaillée de l’histoire de Mûsâ en fonction de ses emplacements dans le Coran.
c- La différence de ce style dans l’exposé des thêmes, que ce soit par le résumé ou la concision, le détail ou la prolixité, en fonction du rythme vocal et de ia syntaxe. Cette disparité prend en considération les étapes traversées par le message islamique et la volonté d’influer psychiquement et spiritueilement sur les destinataires. Ce qui accentue ia distinction entre le style coranique et la prose ou la poésie arabe.
d- L’incidence exercée par l’objectif général de la révélation sur !e contenu comme sur !e styie qui fut investi pour sa réalisation.
e- La relation étroite entre chaque récit et le contexte des versets qui le précêdent ou lui succêdent.
Ce qui signifie qu’il se rattache directement et minutieusement au Coran aussi bien dans son style que dans son contenu. II s’agit en effet, d’une liaison allant du niveau de plus général de l’objectif jusqu’aux plus menus détails de son exécution.